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A mes enfants

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Introduction

«Ne méditent-ils pas sur le Coran [Qour’ãn] ? S’il provenait d’un autre qu’Allah, ils y trouveraient certes maintes contradictions ! » (Coran, 4-82)

«Ce Coran n’est nullement à être forgé en dehors d’Allah, mais c’est la confirmation de ce qui existait déjà avant lui, et l’exposé détaillé du Livre dans lequel il n’y a pas de doute, venu du Seigneur de Hālamīyn [Univers, Humain, Jinn et tout ce qui existe autre qu’Allah]. » (Coran, 10-37)

L’Islam, tel qu'il se définit par lui-même, provient d’une culture où les hommes ont acquis un sens développé de la différenciation entre l'esprit humain et l'environnement naturel, entre la conscience subjective et le fait objectif et, de ce fait, entre l'esprit et la matière.

Cet élément de différenciation chemine avec les progrès de la civilisation monothéiste [scientifique et métaphysique] dans lesquelles l’exercice du Dīne [croyance ou pratique religieuse] demande une participation différente des individus au sein de la société. Aussi, dans ce type de cité monothéiste, un degré de collaboration plus élevé est nécessaire entre des individus disposant d’un tempérament, d’une expérience et de fonctions différentes.

Cette coopération exige, en outre, des formes de communication précises entre les individus et donc, l’utilisation de plus de conventions ou d'accords identiques.

En considérant que chaque individu est un Musulman [c’est-à-dire une créature observante vis à vis de son Créateur], et de ce fait, un élément permanent de ce vaste projet qu’est l’Univers, chaque membre de l’Humanité se voit investi d’une fonction [ce pour quoi il existe ici et maintenant dans le monde] qu’il doit découvrir par le raisonnement à la lumière de la Science et en se servant d’un outil réflexif, le Coran [Qour’ãn].

Pour cela, l’homme doit s’éveiller à la conscience qu’al-Yāwm al-Qiyāma [« le Jour du Jugement/Résurrection»] est une certitude ! Cette prise de conscience l’amène à remplir au mieux sa fonction et à trouver sa place en tant que créature musulmane au sein de la Création.

« Et avertis par ceci [Coran], ceux qui craignent d’être rassemblés devant leur Seigneur, qu’ils n’auront en dehors d’Allah ni allié, ni intercesseur. Peut-être deviendraient-ils pieux ! » (Coran, 6-51)

I - Qu’est-ce que l’Islam ?

«Ô gens ! Certes une preuve évidente [Coran] vous est venue de la part de votre Seigneur. Et Nous avons fait descendre vers vous une lumière éclatante. » (Coran, 4-174)

L’Islam, d’un point de vue anthropologique, archéologique et historique reste la forme originelle de la croyance et de la pratique religieuse humaine.

«Nous dîmes : « Descendez de cette endroit [Jānna -« Paradis »], vous tous [Iblīs, Hādām et son épouse] ! Toutes les fois qu’une guidée [Message, Révélation] vous [Hādām, son épouse, leur descendance : l’humanité] viendra de Ma part, ceux [des humains] qui suivront Ma guidée n'auront rien à craindre et ne seront point affligés ». » (Coran, 2-38)

«Dirige tout ton être vers le Dīne [croyance ou pratique religieuse - Islam] exclusivement [pour Allah] : telle est la nature qu’Allah [FitratouAllah ou Dīne Allah] a originellement donnée aux humains [pas de changement à la création d’Allah]. Voilà, le Dīne de droiture [Islam] ; mais la plupart des gens ne savent pas. » (Coran, 30-30)

«Et Nous n’avons envoyé de Raçoūl [Messager, Envoyé] qu’avec la langue de son peuple, afin qu’il les éclaire… » (Coran, 14-4)

L’Islam2 est une sorte de protocole de l’adoration divine, c’est à dire un ensemble des formes à observer dans la vie en société, une façon intelligente de conduire son existence, une manière qu’a l’homme, en tant qu’individu, de concevoir son humanité [essence de l'être] et d’établir son existence en tant qu’être humain. De ce fait, au niveau social, l’Islam incarne La Cité de l’Homme, La Civilisation monothéiste.

«Dirige tout ton être vers le Dīne [croyance ou pratique religieuse- Islam] exclusivement [pour Allah] : telle est la nature qu’Allah [FitratouAllah ou Dīne Allah] a originellement donnée aux hommes [pas de changement à la directive d’Allah]. Voilà, le Dīne de droiture [Islam] ; mais la plupart des gens ne savent pas. » (Coran, 30-30)

Ainsi entendu, l’Islam ne se fige pas dans un rituel ritualisant, une cérémonie cérémonialisante ou une dimension spatio-temporelle restreinte. Il régit la vie de l’homme dans tous ses actes, à tout moment, en tous lieux et il n’existe dans sa conception aucune limite d’action, de temps ou d’espace. La déité y est, avec constance, pensée au niveau transcendant et personnel le plus élevé.

Le fait d’étudier les religions autres que la croyance monothéiste de l’Islam exige d’abord de noter leur degré de correspondance avec le concept que nous avons de la croyance, puis d'employer de nouvelles manières de les définir lorsqu’aucune correspondance avec celui-ci n'est trouvée.

Ce concept n’explore pas l’accord ou le désaccord doctrinal [sur les idées de Dieu ou de conduite morale, par exemple] mais cherche à analyser si les institutions ou systèmes que l'on a dénommés religions ont la même fonction, dans différents contextes culturels.

Quant à la définition et à l'étude de l’Islam, elles coïncident jusqu’à présent avec l'expansion politique et économique de l'Europe occidentale. De fait, la majorité des travaux relatifs à l’Islam est d’ordre comparatif et n’est généralement établie qu’en s’efforçant de trouver des similitudes avec les croyances étrangères ou leur hiérarchisation.

Mais elle s’établit aussi, malheureusement et par la même occasion, en cherchant les moyens de prouver sa caducité face à ces dernières. C’est une action, une manière de considérer, d'examiner l’Islam, de se le représenter, de le juger d’un point de vue polémique.


2 Ce terme doit être compris ici dans son sens premier d’obéissance et d’adoration à Dieu, et non au sens strict de religion révélée.

3 SMITH & G. ELLIOT, « Human History »

4 WOOLLEY & C. LEONARD, « Les Sumériens »

5 E. PITTARD, « Les Races et l’Histoire »

6 J. LUBBOCK, « The Origin of Civilization »

II - Les sociétés préislamiques

«Nous avons envoyé dans chaque Oūmā [communauté] un Raçoūl [Messager] [pour leur dire] : « Adorez Allah et écartez-vous du Taghoūt [Rebelle, Idole, faux dieu, tyran, despote]. Alors Allah en guida certains, mais il y en eut qui furent destinés à l’égarement. Parcourez donc la terre, et regardez quelle fut la fin de ceux qui traitaient [Nos Roūçoūl : Messagers] de menteurs. » (Coran, 16-36)

Les historiens et les spécialistes de l’Islam [islamologue, orientaliste, arabisant] se plaisent à décrire l’Arabie préislamique comme une région particulièrement inhumaine, un territoire sans société, par rapport aux autres contrées à sa frontière qui auraient possédé la « Civilisation », la Science, la Morale, la Spiritualité, etc.

Ainsi, on enseigne, par exemple, que l’Égypte, Rome ou la Grèce vivent dans un état civilisationnel où règnent une certaine humanité, d’intéressants rapports de voisinage, d’authentiques échanges socioculturels et économiques.

Tout comme l’Arabie, les sociétés antiques sont logées à la même enseigne : celle de la mécréance, de la tyrannie, de l’inhumanité, des conflits, de l’esclavage, des perversions, etc. Bref du Désordre.

A - Un peu d’histoire

1 - L’Arabie

Jusqu'à une époque assez récente, la connaissance de l'Arabie se limitait aux écrits des premiers géographes musulmans et aux récits souvent farfelus de quelques anciens grecs et romains. Mais, la majeure partie de ces informations n'est pas crédible. Aucune recherche archéologique n’a jamais été effectuée dans ce pays. Les migrations depuis la péninsule arabique vers les régions avoisinantes sont les premiers faits connus de l'histoire de l'Arabie3. Des millénaires av. J.C., des groupes de populations quittent cette région et émigrent à travers le monde. Certains sont dans les vallées du Tigre et de l'Euphrate en Mésopotamie. Ces peuples sont actuellement connus sous le nom d'Assyro-Babyloniens.

Un autre groupe de Sémites4 quitte l'Arabie vers quelques millénaires av. J.C. et s'installe le long du rivage oriental de la Méditerranée5. Certains de ces immigrants deviennent les Amorites et les Cananéens des époques ultérieures.

a - Les anciens royaumes

Les régions plus élevées et mieux irriguées de l'extrémité Sud-Ouest de la péninsule sont occupées à une époque reculée par trois royaumes. Le premier, le royaume minéen6, se situe dans les régions intérieures du Yémen actuel, mais il occupe probablement presque tout le Sud de l'Arabie.

On trouve ensuite le royaume des Sabéens7 qui a été fondé, selon les historiens, vers 930 av. J.C. et dure jusqu’environ 115 av. J.C. La capitale et la principale ville du royaume était Marib qui, sans doute, eu un rayonnement supérieur à celui de toutes les autres villes de l'ancienne Arabie par sa position stratégique. Celle-ci est due au barrage fournissant de l'eau et le contrôle des routes des caravanes reliant les ports de la Méditerranée à la région productrice d’encens de Hadramaout. Les Himyarites supplantent les Sabéens dans le sud de l'Arabie. Le royaume de Himyar dure environ de 115 av. J.C. jusque vers 525 apr. J.C.

b - Des Nabatéens aux Perses.

Plusieurs Etats ont existé au nord de l'Arabie au Ier siècle apr. J.C. et dans la période qui précède. Le Royaume des Nabatéens s'étendit vers le Nord jusqu'à Damas, pendant une brève période [de 9 av. J.C. jusqu'à 40 apr. J.C.]. Ceci est attesté par les ruines de Pétra, la capitale des Nabatéens, situées dans le Sud-Ouest de la Jordanie actuelle.

Au IIIe siècle, les Abyssins du royaume d’Aksoum dans l’Éthiopie actuelle [Abyssinie], qui se sont convertis au Christianisme de type monophysite8 se répandent en Arabie dans la région du sud-ouest.

Le Judaïsme est également introduit dans la région. Ces deux religions ne réussissent jamais à s'implanter et à remplacer les croyances de l'époque, qui s'appuient sur le polythéisme et principalement sur l'astrologie et l'occultisme. Au cours du siècle suivant, la Perse occupe, sous le règne des Assanides, une partie de l'Arabie et en particulier la région actuelle du Yémen.

2 - Au voisinage de l’Arabie9

a - L’Égypte.

Les périodes les plus reculées de la société égyptienne10 demeurent mal connues et le resteront probablement. L'information reste lacunaire. Elle est essentiellement fondée sur les inscriptions en hiéroglyphes gravées sur les monuments. Les déserts égyptiens furent, quant à eux, le lieu de naissance du monachisme11 chrétien. Alexandrie fut aussi le berceau de l'Arianisme12.

b - La Perse.

Le fils et successeur du souverain, Khosro Ier Anocharvan remporta les guerres contre l'empereur byzantin Justinien Ier et étendit son pouvoir jusqu'à la mer Noire et au Caucase, devenant ainsi le plus puissant de tous les rois sassanides. Puis, il rétablit le zoroastrisme13 comme religion d'Etat.

c - La Mésopotamie.

La Mésopotamie14 dominée par les Perses fut divisée entre les satrapes15 de Babylone et d'Assur16. Des conflits éclatèrent dans les régions du Nord-Ouest avec la province romaine de Syrie qui est annexée plus tard à l'Empire byzantin [395].

d - La Chine.

Au cours de la seconde moitié du Ve siècle, la dynastie des Wei17 du Nord adopta une politique de sinisation. Les chefs des tribus excédés par cette dernière se rebellèrent, ce qui provoqua la chute de la dynastie en 534. De 534 à 581, le nord de la Chine fut de nouveau aux mains de dynasties non chinoises.

e - L’Inde.

L’empire, sous le règne de Chandragupta II qui domina toute la partie nord de l'Inde, s'effondra vers 550. Le Nord de l'Inde passa par la suite sous la domination d'un puissant royaume fondé en 606 par Harsa, dernier grand monarque bouddhiste de l'histoire indienne.

f - Byzance.

Constantin le Grand en 326 reconstruit la ville pour en faire la nouvelle capitale de l'Empire : Constantinople [330]. Seule capitale de l'Empire byzantin de 395 à sa chute en 1453 et à sa conquête par les Ottomans.

g - La Grèce.

L'histoire de l'Empire byzantin se confond avec celle de la Grèce et de la région égéenne. Bien avant le VIe siècle, la Grèce est un territoire obscur, sans intérêt, laissé à l'abandon.

h - Rome.

Les Ostrogoths, puis l’occupation byzantine destructrice [VIe siècle] précipitent la chute de la ville et la diminution de sa population. A cette période, le siège de la papauté s’établit à Rome qui devient une simple bourgade.

i - L’Europe des barbares.

Les Wisigoths [455 et 476] dominent toute la Méditerranée occidentale, de l'Espagne à l’Italie, malgré la résistance du pape Léon Ier le Grand. Les Barbares entraînent la disparition de l'Empire romain d'Occident. La dislocation de ce dernier laisse derrière lui des armées de moines, chargées de christianiser par des méthodes peu orthodoxes les populations ignorantes et désemparées.


3 SMITH & G. ELLIOT, « Human History »

4 WOOLLEY & C. LEONARD, « Les Sumériens »

5 E.PITTARD, « Les Races et l’Histoire »

6 J. LUBBOCK, « The Origin of Civilization »

7 L. FEBVRE, « La Terre et l’Évolution humaine »

8 Monophysite. Qui se rapporte au monophysisme, doctrine chrétienne qui reconnaît au Christ qu'une seule nature.

9 Quelques indications sur les contrées voisines de l’Arabie à la période de l’avènement de l’Islam [VIe siècle].

10 A. ERMAN, « Life in Ancient Egypt »

11 Monachisme. Etat de moine, vie monastique.

12 Arianisme. Doctrine d’Arius qui enseignait que, dans la Trinité, le Fils n’est pas égal au Père, qu’il n’est pas de même nature et ne participe pas de son éternité. La divinité du Christ n’était donc que secondaire et subordonnée.

13 Zoroastrisme. Doctrine de Zoroastre, sorte de dualisme fondamental entre le bien et le mal [Mazdà-Ahriman] où l'homme a le rôle important de faire pencher la balance du côté du bien en menant une vie vertueuse.

14 G. ELLIOT, « Human History »

15 L. DELAPORTE, « La Mésopotamie et Civilisation chaldéo-assyrienne »

16 G. CONTENAU, « La Civilisation d’Assur et de Babylone »

17 J. NEEDHAM, « Science and Civilization in China »